Éléments de phonologie fonctionnelle pour l’intervention et l’orthophonie
Guide pratique avec application au français
Présentation
à propos
du livre
Le travail d’observation et de dépistage des difficultés du langage, effectués avant le diagnostic formel par un orthophoniste qualifié, doit permettre d’évaluer correctement les articulations phonétiques de l’enfant dans l’utilisation de la parole. Depuis des années, dans le cadre de mon enseignement en Techniques d’éducation spécialisée, j’ai constaté à quel point nous étions très mal outillés dans ce domaine.

Point clé
Importance de la qualité des transcriptions phonologiques
Compléter un bon travail d’analyse phonologique exige des transcriptions de qualité, uniformes et constantes 2 par des individus qui maîtrisent les outils de travail et qui sont en contact direct avec l’enfant évalué. L’Alphabet Phonétique International (API) est l’outil indispensable à toute méthode pouvant rapidement déceler les processus phonologiques en présence et, sans ces transcriptions valides, les erreurs d’interprétation vont toujours subsister et rendre les intervenants inefficaces dans leur travail. J’ai voulu élaborer ce guide à l’intention des intervenants ou des spécialistes qui, de près ou de loin, s’intéressent à l’analyse des processus phonologiques qui surviennent chez les petits.
Les défis de l’enseignement de l’analyse phonologique

Il y a quelques années de cela, lors de mon cours d’observation, une étudiante m’expliquait avec une assurance ahurissante que les lèvres de l’enfant ne participent pas à la production articulatoire du son [k]. La dorso-vélaire ne peut pas être produite avec la bouche fermée. Une explosion articulatoire est nécessaire pour produire [k]. Les lèvres doivent être séparées et la bouche doit être ouverte pour permettre à la consonne [k] d’être réalisée phonétiquement lorsque le dos de la langue se sépare du voile du palais au moment de l’explosion.
Parfois, les problèmes liés à l’analyse des difficultés du langage résident dans des formations axées sur des pathologies du langage qui négligent l’enfant ayant un bilan de santé normal. Un survol rapide des mémoires et thèses récentes montre une forte propension à pousser les études du côté de l’aphasie, des dysfluidités, de la déficience auditive, de la dyslexie, de la dysphasie, de l’autisme, de la dysarthrie, de la dyspraxie, de la fente palatine et des lésions hémisphériques. Ces champs d’études touchent une minorité de patients. Une étude longitudinale plus poussée sur le développement phonologique des enfants âgés de 0 à 7 ans (avec un échantillonnage considérable) viendrait baliser avec précision les différentes étapes d’intégration des phonèmes par l’enfant en santé. Pour le moment, nous nous rabattons sur la chronologie d’acquisition de RONDAL (2003 : 69) dont le tableau, qui fait référence dans le domaine ne présente pas les voyelles /o/, /ø/ et /ɑ/. RONDAL utilise le symbole /õ/ pour la nasale /ɔ̃/. Contrairement à ce qu’il dit, la voyelle /œ̃/ devrait normalement être intégrée en même temps que les autres voyelles nasales, la nasalité étant le seul trait distinctif la différenciant de la voyelle /œ/. Les voyelles /o/ et /ø/ devraient être acquises en même temps que /e/, vers trois ans. La voyelle /ɑ/ devrait, quant à elle, être acquise à 3 ans, tout comme /a/. La description de RONDAL ne tient pas compte non plus de l’acquisition des dorso-palatales /j/ et /ɥ/, de la dorso-vélaire /w/ qui devraient, quant à elles, être intégrées vers l’âge de 5 ans, tout comme les constrictives /l/ et /r/ (voir MACLEOD (2014 : 3). Il y a donc une typologie d’acquisition des phonèmes français à établir avec plus d’exactitude.